Les limites de l'éducation bienveillante/positive

Depuis que j'exerce en cabinet libéral, j'ai reçu beaucoup d'enfants. J'ai été surprise de voir beaucoup de "parents coupables", non pas qu'ils l'étaient en réalité mais c'est comme cela qu'ils se présentaient, tant dans leur posture que leurs mots.

Les motifs de consultation étaient sensiblement les mêmes, des "problèmes de comportement" soit à l'école, soit à la maison, voire les deux. Au moment du premier rendez-vous, apparaissait souvent l'application parfois à la lettre de "l'éducation bienveillante/positive". Si on s'arrête juste sur les signifiants "éducation" et "bienveillante"/"positive" rien à redire, c'est évidemment de bon aloi que de vouloir "bien" éduquer son enfant, il n'y a rien à redire sur ce principe. En creusant un peu cette locution, on s'aperçoit qu'elle stigmatise de manière drastique les parents qui n'emploient pas cette méthode, qu'ils seraient des parents "malveillants".

J'ai donc pris le temps d'écouter ces parents sur cette méthode, les "règles d'or", les "clés" et les injonctions s'enchainaient, une sorte de liste pour atteindre le bonheur et devenir le parent parfait. Simple constat, s'ils se retrouvaient dans mon cabinet, c'est bien que cela n'avait pas fonctionné. Les parents étaient épuisés et l'enfant déboussolé.

Tout en me renseignant sur cette méthode d'éducation, j'ai continué d'écouter les parents en recevant en parallèle les enfants seuls autour de dessins et de jeux. 

J'ai constaté du coté des parents qu'ils se sentaient mis en échec, qu'ils s'étaient empêtrés dans toutes les règles à suivre et ne savaient plus comment s'adresser à leur enfant de peur de leur faire du mal rien qu'en leur adressant la parole. Du côté des enfants, j'ai constaté le plus souvent un manque de repères et de limites ce qui pouvaient les angoisser, mais aussi des enfants qui se comportaient comme des mini-adultes avec un imaginaire pouvant être très réduit. Autre constat, dans certaines familles, l'enfant faisait la loi, tyrannisant ses parents, une sorte d'enfant-roi 2.0.

Un des arguments de l'éduction bienveillante/positive prône un "pied d'égalité" entre l'enfant et l'adulte, qu'il soit parent ou éducateur. Seulement un enfant ne dispose pas de l'expérience de l'adulte, il n'est donc pas son égal. Alors oui, écouter son enfant est une bonne chose, le laisser s'exprimer aussi, mais ce n'est pas à confondre avec un pied d'égalité. Un enfant et un parent ont des place différentes, un positionnement différent.

Il n'y a pas Une Bonne Education (avec des majuscules partout), pas de règles à suivre à la lettre, pas de mode d'emploi pour être parent. Oui cela peut faire peur se on peut se sentir seul lâché dans la nature. Le parent parfait n'existe pas (et s'il existait, il serait sans doute dévastateur). Le mieux que nous pouvons faire, c'est d'être des parents "suffisamment bon" (terme emprunté à Winnicott). Etre parent n'est pas inné, c'est un apprentissage constant.

Si la parentalité vous semble complexe, que vous vous posez des questions dans y trouver réponse, n'hésitez pas à consulter, seul ou avec votre enfant, afin d'identifier les points qui vous encombrent et ainsi les dépasser